Faire relire vos contrats par un avocat avant signature : pourquoi est-ce essentiel ?
Dans la pratique, il arrive souvent qu’une des parties à un contrat, souhaitant gagner du temps, le signe sans convenir précisément du résultat souhaité et des prestations à accomplir et ce au prétexte que, d’une part, le prix est déterminé et que, d’autre part, la chose est entendue.
Cela est d’autant plus problématique lorsqu’un prestataire, qui souhaite rapidement conclure un contrat avec un client, accepte de signer le contrat proposé par ce dernier – alors que le prestataire est le mieux à même de proposer le contrat approprié.
Dans cette volonté de gagner du temps, des contrats types sont souvent proposés. En apparence, ces contrats types semblent bien structurés.
Pourtant, dans la plupart des cas, le rédacteur de l’acte laisse place à des imprécisions entraînant parfois des complications dans la cohérence de l’acte.
Il n’est pas forcément naturel que ce soit le client, celui qui paye donc, qui détermine le périmètre, les enjeux et les modalités de la prestation convenue qui, quand elle est technique (contrat informatique), nécessite d’être clairement détaillée. Son cocontractant, le prestataire, en approuvant l’acte, s’engage à réaliser le résultat que le client souhaite, parfois à son propre détriment.
Lorsque le client propose une clause, il se sert dans la plupart des cas d’un modèle (qu’il a pu déjà utiliser par le passé avec un autre prestataire) qui ne correspondra donc pas à la situation qu’il convient d’encadrer à l’espèce.
Il s’agira dans cet article de s’intéresser à certaines clauses qui illustrent ce décalage afin de mieux cerner la nécessité d’une relecture par un avocat de certains de ces contrats types ou non suffisamment dédiés à la situation qu’ils visent à encadrer. Une étude exhaustive de l’intégralité des clauses pertinentes d’un contrat n’étant pas souhaitable, nous nous concentrerons ici sur les clauses relatives (i) à l ’objet, (ii) aux obligations réciproques des parties (iii) au paiement du prix.
1) La clause objet
La clause objet vise à décrire le périmètre de la prestation en ce qu’elle recouvre ou ce qu’elle ne recouvre pas. Or, comme le client définit souvent un périmètre large, il existe un risque pour le prestataire d’être engagé dans une situation dans laquelle il ne parviendra pas à fournir au client le résultat souhaité par celui-ci.
L’intérêt du prestataire est d’être en adéquation avec ce qui est prévu dans le cahier des charges tandis que l’intérêt du client est de proposer une clause floue afin de bénéficier, pour le même prix, d’un ensemble de prestations le plus large possible.
La rédaction d’une clause objet précise et conforme à la réalité des missions attendues du prestataire permettra d’éviter des incompréhensions.
De même, en définissant chaque terme du contrat, cela permet de bénéficier d’un ensemble contractuel intelligible et d’éviter le manque de clarté entre les parties.
Dans ces conditions, il est nécessaire que vous vérifiiez que le contrat qui vous serait proposé à la signature par votre client détermine précisément l’étendue et la nature de votre prestation à venir.
Le flou accompagnant l’objet du contrat vous sera à coup sûr défavorable. Votre intérêt est ainsi de le définir de la façon la plus stricte possible.
Ce flou donnera matière à interprétation, notamment en matière de contrat informatique. C’est de cette possibilité d’interprétation que la plupart des litiges naissent.
2) Les obligations réciproques des parties
La clause d’obligation réciproque est la clause par laquelle les parties s’obligent l’une envers l’autre – permettant ainsi de favoriser l’équilibre contractuel entre elles.
On pense souvent que le prestataire a une obligation de faire tandis que le client est tenu à une simple obligation de payer.
En réalité, il peut être mis à la charge du client diverses obligations de faire / collaborer.
Des interventions du client peuvent en effet être nécessaires pour mettre le prestataire en mesure de livrer les prestations convenues, notamment en transmettant des informations, en laissant le prestataire effectivement accéder au lieu où ses prestations doivent être réalisées, etc.
En cas d’inertie du client, le prestataire doit être en mesure de protéger sa responsabilité et de démontrer que l’inexécution contractuelle qui pourrait lui être reprochée à terme, ne lui est pas entièrement imputable puisque le client l’a mis dans l’impossibilité d’exécuter le contrat.
Un manque de précision dans le contrat proposé par le client pourra donc avoir une incidence concrète sur la responsabilité du prestataire.
Ce manque de précision aura des effets sur la réalisation du résultat de la prestation.
Le client pourrait être fondé à réclamer le remboursement des sommes engagées en considérant que le prestataire n’a pas réalisé les missions convenues – alors même que c’est en raison du comportement du client que les missions n’ont pas été convenablement réalisées.
En tout état de cause, il existe dans chaque contrat un besoin de communiquer entre les parties. Une partie n’ayant pas été assez précise et claire sur ce point pourra voir sa bonne foi être remise en cause. D’où l’intérêt d’anticiper ce risque via des clauses dédiées à la situation et aux actes positifs essentiels attendus du client.
3) La clause de paiement du prix
Cette clause appelle plusieurs observations.
En matière de contrat informatique par exemple, les prestataires se voient trop souvent imposer des clauses de recette expresse, par opposition à une clause qui leur serait plus favorable, la clause de recette tacite.
Cette distinction emporte pourtant des conséquences importantes en termes de paiement du prix, notamment lorsqu’il est convenu que le paiement du prix sera effectué en plusieurs fois aux différentes dates de livraison des prestations convenues.
La clause de recette expresse renvoie à l’accord explicite du client sur ce qui lui a été livré (= je suis ok) alors que la clause de recette tacite correspond à la règle selon laquelle le silence vaut acceptation après un certain délai (= je n’ai pas dit oui mais mon absence de réponse veut dire ok).
Cette acceptation (tacite ou expresse) de la livraison entraîne la possibilité d’exiger le paiement du prix.
En cas de clause de recette expresse imposée par un client à son prestataire, ce dernier pourrait se retrouver dans une situation dans laquelle il ne serait pas fondé à réclamer le paiement de sa créance tant que le client n’aura pas expressément formulé son accord en ce sens.
Une fois encore, l’inertie du client pourrait donc être de nature à entraîner la naissance d’un litige.
Ces quelques exemples illustrent parmi d’autres le fait que la relecture du contrat, qui vous serait proposé par celui qui ne réalise pas la prestation, permet d’anticiper au mieux les difficultés qui pourraient survenir.
Il est préférable, en votre qualité de prestataire, de solliciter votre conseil habituel afin de définir le périmètre de votre intervention, les limites de votre responsabilité, ainsi que l’évènement permettant de déclencher votre paiement. Entre autres….