Que faire face à une opposition de sa marque ?


Vous venez de procéder au dépôt de votre marque française et vous vous rendez compte depuis l’interface de l’INPI qu’une procédure en opposition a été enclenchée ?

Mais, qu’est-ce que l’opposition d’une marque ?

La procédure en opposition permet à une personne disposant d’une ou plusieurs antériorités[1] sur votre marque d’empêcher l’enregistrement de celle-ci puisqu’elle porterait atteinte à ses droits.  Cette démarche n’est envisageable que dans les deux mois suivant l’enregistrement de cette marque par l’INPI[2].

Au-delà de ce délai, la procédure en opposition à l’encontre de la marque enregistrée n’est plus possible, seule une annulation pure et simple de la marque pourra être demandée devant l’INPI[3].

Si une opposition est formée, l’opposant dispose alors d’un délai d’un mois pour verser son mémoire d’opposition à la procédure.

Pour apprécier si la marque dont il est demandé l’enregistrement porte atteinte aux droits de l’opposant, l’INPI procède à une comparaison entre la similitude des signes enregistrés, des classes de produits et services visés, et apprécie le risque de confusion pouvant en résulter pour le public entre la marque dont l’enregistrement est requis et le signe qui lui est antérieur.

La procédure d’opposition peut s’avérer être une procédure complexe, en ce qu’elle est enfermée dans des délais stricts, des conditions de formes et de fond, et nécessite souvent l’intervention de professionnels tels que les conseils en propriété industrielle ou les avocats en propriété intellectuelle.

Pour faire face à une opposition, il convient dans la plupart des cas d’effectuer une analyse du mémoire d’opposition en comparant la marque contestée à l’antériorité en cause (1), de déterminer une stratégie, si c’est possible, pour répondre à l’opposition formée (2) et d’envisager les autres options possibles en parallèle de la procédure d’opposition telles que la négociation avec l’opposant (3), voire parfois de considérer la possibilité de procéder à un changement d’identité de marque (4).

 

1) Réaliser une analyse de la marque contestée et de l’antériorité évoquée

La première chose à faire en présence d’une opposition consiste à analyser l’antériorité sur laquelle se fonde l’opposant (l’opposant peut parfois se fonder sur plusieurs antériorités).

Les antériorités sur lesquelles un opposant peut se baser sont listées par l’article L 711-3 du Code de la Propriété Intellectuelle (marques, droits d’auteur, nom de domaine, droits de la personnalité, enseignes, nom commercial…).

Il est nécessaire de regarder attentivement cette antériorité, afin de déterminer s’il s’agit d’un signe identique ou similaire à votre marque. La comparaison des signes se réalise sur trois plans, à savoir phonétique, visuel et intellectuel.

Si l’antériorité en cause est une marque, ce qui est majoritairement le cas ; il est nécessaire de vérifier les informations relatives à cette marque dite antérieure (type de marque (nationale, internationale, européenne), date d’enregistrement, territoire visé, classes désignées et produits et services en cause).

Après avoir procédé à un comparatif des signes, il sera nécessaire de procéder à un comparatif des produits et services désignés par la marque contestée.

En comparant les deux marques, cette analyse permet de déterminer quels sont les points forts et points faibles de la marque contestée face à l’opposition et de développer une stratégie consistant à vous défendre face à l’opposition et/ou décider de privilégier d’autres options.

2) Adopter une stratégie dans le cadre de l’opposition

Lorsque vous souhaitez protéger vos intérêts dans le cadre d’une action en opposition, il convient généralement de rédiger un mémoire en opposition répondant à celui qui vous a été transmis.  

Ce mémoire a pour objectif de développer les moyens de faits et de droit au soutien de vos prétentions et est accompagné de pièces communiquées dans le respect de la procédure.

Il n’est pas rare que des antériorités à l’antériorité fondant l’opposition nécessitent d’être débattues au soutien de vos intérêts.

Dans un tel cas de figure, l’INPI étant tenue de ne débattre que des marques ou des antériorités figurant au dossier, il conviendra de demander un sursis à statuer en justifiant que des points doivent être tranchés en amont de l’opposition.

Cependant, en fonction de la stratégie adoptée ou des besoins du déposant, il peut parfois s’avérer plus judicieux de privilégier la voie amiable en entrant en contact avec l’opposant à l’occasion de négociations.

3) Envisager la négociation

Si l’opposant est enclin à négocier avec vous concernant l’opposition demandée, il sera alors nécessaire pour sécuriser vos intérêts de lui faire signer un accord de coexistence de marque et de suspendre conjointement la procédure en cours pendant les négociations.

Nous suggérons le plus souvent de recourir à un conseil pour la rédaction de ce protocole transactionnel afin notamment d’éviter une résolution future du protocole pour le non-respect strict du périmètre d’un accord qui aurait été mal défini ab initio.

En cas d’échec des négociations, de risque majeur d’être débouté dans le cadre de l’opposition, compte tenu du risque de contrefaçon lié à l’utilisation du signe distinctif dans la vie des affaires du signe contesté pour qualifier les produits et services litigieux, l’issue ne peut être que changer de signe distinctif au plus tôt.

4) Envisager de changer de stratégie de marque

Malheureusement, dans certaines situations, et notamment en l’absence de recherche d’antériorité, la meilleure solution à suivre consiste parfois à recommencer sa stratégie commerciale depuis le début et à changer et déposer une nouvelle marque (pour en savoir plus sur l’importance des antériorités en matière de dépôt, consultez notre article ici).

En tout état de cause, en présence d’une procédure en opposition, il est fortement recommandé de se faire accompagner tout au long de celle-ci et en amont afin de s’assurer la défense de ses intérêts face à une matière qui est souvent trop peu comprise par les titulaires de marques et qui nécessite bien souvent de faire des recherches allant au-delà de ce que l’opposant lui-même à mis en avant.

Sadry PORLON (Avocat Fondateur) et Vicky BOUCHER (Avocate Collaboratrice)

 


[1] La possibilité de fonder l’opposition sur la base de plusieurs antériorités est une innovation de l’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019 relative aux marques de produits ou de services

[2] Délai légal imposé par l’article L 712-4 du CPI

[3]  La déchéance est également envisageable mais pourra être initiée qu’après 5 ans à compter de la date d’enregistrement de la marque et suite au constat que cette marque n’a jamais été utilisée à titre de marque.


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